Les lieux centraux : la traduction comme « normalisation » d'une théorie erronée
La thèse de Walter Christaller, Die zentralen Orte in Süddeutschland(1933), est de nos jours encore l’un des fondements théoriques les plus connus de la géographie et de l’aménagement spatial. L’acceptation internationale du système de ce géographe allemand perdure bien que des critiques fondamentales contre la véracité et la plausibilité du système des lieux centraux aient été formulées dès son apparition et se soient multipliées pendant les dernières décennies.
Le premier exposé : « Traduire Walter Christaller en fabricant des « cadavres exquis » montre comment une traduction tronquée et erronée de Die zentralen Orte in Süddeutschland en anglais de 1954 à 1966, utilisée ensuite par des locuteurs non anglophones, a contribué à l’institution internationale non contestée du système des lieux centraux comme une « science normale ».
Le deuxième exposé : « Traduction et fiction. L’internationalisation comme justification de la recherche sur les lieux centraux dans la république fédérale allemande » s’intéresse aux répercussions de l’acceptation internationale de cette prétendue théorie dans la recherche sur l’espace et l’aménagement spatial de la République fédérale. La promotion des lieux centraux est devenue, grâce à la loi d’aménagement de 1965, un but codifié de la politique de planification spatiale étatique ; elle garde de nos jours une grande importance. Bien que les chercheurs spatiaux et les aménageurs allemands n’aient pas été concernés directement par les traductions de la thèse de Walter Christaller, l’acceptation internationale du système élevé au rang de « modèle » a eu, pour ceux qui ont utilisé ce système après la guerre, une influence importante sur la représentation qu’ils se font d’eux-mêmes et sur sa transmission.