CYBERATO Alter-perspectives disputables

NICOLAS Georges

  • Jean Vogt et l'érosion historique des sols

    Auteurs : 

    Des années 1950 à la fin de sa vie en 2005 Jean Vogt s’intéresse à l’érosion historique des sols. Après avoir présenté en 1953 un Diplôme d’Étude Supérieure à l’Université de Strasbourg sur « Érosion des sols et techniques de culture en climat tempéré maritime de transition (France et Allemagne) », il continue ses recherches dans diverses Universités et au Centre national de la Recherche Scientifique. En 1955 Jean Vogt est : « … convié à une réunion à Paris [au CNRS], à la suite de laquelle furent formulées des propositions de recherche interdisciplinaires. L’érosion historique des sols ne fut pas retenue, pour des raisons qui m’échappent. » Ce texte essaie de comprendre pourquoi et comment, en dépit de ce blocage institutionnel, Jean Vogt a continué ensuite à faire des recherches sur l’érosion historique des sols et pourquoi il a toujours relié cet objet de recherche à l’interdisciplinarité.

  • Djament et Covindassamy : Traduire Christaller en français : du politiquement correct au scientifiquement correct

    Auteur: 

    La règle (et non pas le principe) de traduction qui privilégie le « contexte » est particulièrement dangereuse car elle permet « d’arranger » et de « lisser » les textes traduits en fonction d’idées a priori. A défaut de réhabiliter, l’utilisation de cette règle permet de présenter l’auteur traduit (Walter Christaller) comme « convenable » en dépit de son opportunisme politique (social-démocrate : 1922, nazi : 1940, communiste : 1945, social-démocrate : 1959), de son inconsistance théorique et de son incompétence mathématique. Ce qui permet in fine de ne pas essayer de comprendre pourquoi les géographes de langue anglaise, puis de langue française et bien d’autres, ont pu considérer dans la deuxième moitié du XXe siècle que Walter Christaller était leur Werner von Braun et qu’en adoptant ses idées sur la « centralité », ils allaient mettre la géographie en orbite autour de la science !

  • Lieux centraux – décentraux. Théories de la centralité et réalité des petites villes

    Date de publication : 17-01-2015
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    Activité: 
    professeurs honoraires

    Le système des lieux centraux de Walter Christaller a suscité des centaines de publications depuis 1933 et continue de nos jours à préoccuper de nombreux historiens, géographes et économistes, en particulier en France, en Allemagne et dans les pays de langue anglaise. Or, ce système représente de manière erronée les rapports entre lieux habités et donne une vision biaisée des petites villes, en particulier en raison de la fausseté mathématique de son prétendu « modèle » géométrique.

    Ce diaporama montre comment il est possible de corriger les erreurs de Walter Christaller et de remplacer son modèle géométrique faux par une représentation mathématique exacte puis comment l’on peut comprendre, grâce à la centralité-décentralité, les relations entre les petites villes sans qu’il soit nécessaire de se référer à une théorie réfutée utilisant une modèle géométrique faux.

    Citation :

    Radeff, Anne et Nicolas, Georges, Lieux centraux – décentraux. Théories de la centralité et réalité des petites villes, 2008, URL :

    Ce diaporama a été présentés lors du colloque « Capitales ou villes d’appui ? Les petites villes et leurs campagnes du Moyen Âge au XXIe siècle », Colloque organisé par l’UMR 5605 (Centre Georges-Chevrier) et la Société d’Histoire des Petites Villes à Tournus, les 12 et 13 juin 2008.

  • Les lieux centraux : la traduction comme « normalisation » d'une théorie erronée

    Date de publication : 16-01-2015
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    Activité: 
    chercheurs

    La thèse de Walter Christaller, Die zentralen Orte in Süddeutschland(1933), est de nos jours encore l’un des fondements théoriques les plus connus de la géographie et de l’aménagement spatial. L’acceptation internationale du système de ce géographe allemand perdure bien que des critiques fondamentales contre la véracité et la plausibilité du système des lieux centraux aient été formulées dès son apparition et se soient multipliées pendant les dernières décennies.

    Le premier exposé : « Traduire Walter Christaller en fabricant des « cadavres exquis » montre comment une traduction tronquée et erronée de Die zentralen Orte in Süddeutschland  en anglais de 1954 à 1966, utilisée ensuite par des locuteurs non anglophones, a contribué à l’institution internationale non contestée du système des lieux centraux comme une « science normale ».

    Le deuxième exposé : « Traduction et fiction. L’internationalisation comme justification de la recherche sur les lieux centraux dans la république fédérale allemande » s’intéresse aux répercussions de l’acceptation internationale de cette prétendue théorie dans la recherche sur l’espace et l’aménagement spatial de la République fédérale. La promotion des lieux centraux est devenue, grâce à la loi d’aménagement de 1965, un but codifié de la politique de planification spatiale étatique ; elle garde de nos jours une grande importance. Bien que les chercheurs spatiaux et les aménageurs allemands n’aient pas été concernés directement par les traductions de la thèse de Walter Christaller, l’acceptation internationale du système élevé au rang de « modèle » a eu, pour ceux qui ont utilisé ce système après la guerre, une influence importante sur la représentation qu’ils se font d’eux-mêmes et sur sa transmission.

  • Élisée Reclus traducteur de Carl Ritter, passeur de la logique Tout/Partie

    Date de publication : 15-01-2015
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    Activité: 
    professeurs honoraires
    Adresse: 
    Pontarlier

    Dans sa traduction de 1859 intitulée : De la configuration des continents sur la surface du globe et de leurs fonctions dans l’histoire Élisée Reclus coupe et modifie le texte original publié par Carl Ritter en 1852 : Über räumliche Anordnungen auf der Außenseite des Erdballs und ihre Functionen in Entwicklungsgange der Geschichten. Élisée Reclus y transmute le monde « humain » dominé par le « divin » de Carl Ritter en un monde « humain » à la recherche de l’harmonie avec la « nature » hors de toute transcendance. On pourrait supposer qu’à la suite d’un tel changement fondamental la logique spatiale de Carl Ritter disparaisse ou soit profondément altérée. Or, il n’en est rien : l’analyse de l’espace terrestre par Carl Ritter à l’aide d’un mode de pensée géographique fondé explicitement sur les rapports entre le Tout et les Parties résiste aux coupures et modifications d’Élisée Reclus. Dans sa traduction française, tout en supprimant les mots « Tout » (« Ganze ») et « Partie » (« Teil ») qui figurent dans l’original allemand, Élisée Reclus ne modifie pas l’utilisation que Carl Ritter fait de la logique Tout/Partie. Élisée Reclus continue d’ailleurs à l’utiliser implicitement dans sa Nouvelle Géographie Universelle (1876-1894) et dans L’Homme et la Terre (1905-1908).

     

    Suite à cette disjonction entre logique spatiale et causalité peut-on distinguer chez Élisée Reclus un niveau épistémologique (la théorie) qui serait autonome du niveau pratique (l’utilisation de la théorie pour promouvoir l’anarchie) ce qui justifierait de traiter sa pensée géographique indépendamment de son idéologie anarchiste ?

     

    Au cours d’un entretien dans sa maison de Clarens au bord du Léman avec un visiteur hollandais, Élisée Reclus a répondu par avance à cette manière de le débiter en parties rangées dans des tiroirs autonomes. « Après quelques minutes de causerie dans le cabinet de travail encombré de livres, de cartes déliées et de manuscrits, [son interlocuteur] fit une allusion polie à la Géographie Universelle, dont l’avant dernier volume allait paraître [1893] : « Oui, dit Reclus, je suis géographe, mais je suis avant tout anarchiste. » (H. ROORDA VAN EYSINGA, 1908, p. 186) »

     

    Cette façon de se présenter et se définir lui-même n’implique cependant pas que l’on puisse hiérarchiser le « personnage extraordinaire », « l’écrivain géographe », « le grand penseur » et le « passeur de logique » en réduisant le géographe Élisée Reclus à n’être qu’anarchiste. Mais symétriquement Élisée Reclus ne peut pas non plus être considéré comme étant avant tout un « géographe allemand » (FARINELLI, 2007) parce qu’il éprouvait une admiration et un amour filial pour Carl Ritter dont il voulait égaler l’Erdkunde. « A Bruxelles, [écrit-il en mars 1894] il me fallait en même temps lutter contre le Conseil d’administration de l’Université […] et maintenir ma dignité de géographe quoiqu’anarchiste et d’anarchiste quoique géographe. (RECLUS, 2010-2014, Tome III, p. 160) »

     

    Nous allons montrer qu’on ne peut subsumer l’homme dans un personnage car chez Élisée Reclus la foi athée de l’anarchiste est indissociable de la tradition nouvelle du géographe.

     

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